
Ambulants, ils ont l’habitude de sillonner les marchés aux quatre coins de la région ou les fêtes foraines. Mais ils sont contraints, depuis le début de la crise, à l’immobilité. Alors, chacun à leur façon, ils réinventent leur métier : en livrant à domicile, en vendant devant chez eux ou encore en se lançant dans la vente en colis.
Vous avez l’habitude de retrouver Eddy Rotthier, spécialisé dans les fromages et salaisons, le samedi à la place Crombez de Tournai. Depuis l’arrêt des marchés, c’est près de son entrepôt qu’il vend ses marchandises. Les mardis et jeudis de 15h à 18h et le samedi de 10h à 13h. « Quand il y a de la demande, je sors aussi le camion, le vendredi surtout. Je me situe devant Ok d’Allach le long des quais à Tournai. Au début, j’étais juste derrière, où il y a mon entrepôt, mais le patron du café m’a proposé de m’installer devant chez lui pour plus de visibilité ».
Fromage de Haute-Savoie, Comté et salaison du Jura, de Lyon, depuis 2004, au volant de son camion, ce Français d’origine sillonne les villages de Belgique avec des produits qu’il veut de qualité. « Je ne faisais que de la salaison, mais la gamme s’est étoffée au fil des années ».
400 kilos sur les bras
Le Tournaisien d’adoption regrette l’arrêt des marchés. « Lors du dernier week-end où nous avons pu travailler, il y avait 60 % d’ambulants en moins, uniquement alimentaires. Nous pouvions respecter une distance de cinq mètres entre nous et la recette avait été bonne ». Depuis, c’est un tout autre son de cloche. « Lors de ce dernier week-end, je suis allé chercher 400 kg de marchandise dans le Nord-Pas-de-Calais. Elle me reste sur les bras. Chaque morceau que je découpe pour un client, je me dis que c’est un morceau qui ne sera pas jeté ».
Des jours difficiles
Les fromages comme le brie ou les camemberts ont une durée de vie de 15 jours. « Les meules fermées, avec une croûte, on peut les garder longtemps. Seulement, on les coupe en quatre car une meule pèse 60 kg. Je peux tenir cinq semaines maximum. Après, il faudra jeter ». L’ambulant a sollicité une aide, elle sera environ de 1.300 €. « C’est mieux que rien. J’ai un loyer à payer pour mon logement à Tournai et j’ai des frais fixes de 2.200 € par mois. Je paie toujours mes factures directement, là, j’ai du retard. J’espère que les fournisseurs seront compréhensifs ».
Puisque son emploi du temps s’est allégé, Eddy Rotthier en profite pour aider. Il va à la pharmacie pour les personnes plus âgées ou au supermarché. « J’ai été interpellé. Oui, les chariots sont désinfectés, mais le reste ? Tout le monde touche les produits, ouvre les portes des frigos… Dans mon camion, la distance est respectée, je mets des gants, j’ai du gel, il y a la vitre de protection et je suis le seul à toucher les produits. C’est aberrant de constater la différence de situations ». A partir de 20 €, Eddy Rotthier se propose même de livrer. « J’avais aussi pensé au porte-à-porte mais c’était trop compliqué et les risques de contamination était bien présents ». Pour l’ambulant, comme pour ses collègues, il ne reste plus qu’à attendre des jours meilleurs…
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